Brain.Salad a écrit:Pour ce que je comprends de la question initiale de Coraline c'est : lorsque vous vous décarcassez à écrire un texte pour plaire à un jury/public, comment se remettre d'un retour lapidaire et parvenir à reprendre le clavier ensuite ? Comment réagir à cette attitude ?
J'avais bien compris ça comme ça ; même si depuis la question a été affinée et Coraline a exposé plus concrètement son problème. J'observais simplement que, sauf à croire que les auteurs ont une sensibilité particulière plus développée et sont de petites choses fragiles, tout acte, projet, réalisation dans lequel un individu s'investit pleinement et qui est susceptible de recevoir une critique négative peut blesser. Je comprenais donc mal pourquoi il semblait nécessaire d'insister sur la spécificité des auteurs face à la critique. Maintenant que la question a été contextualisée, je comprend mieux la démarche de Coraline.
StephLong a écrit:Et pour finir j'ai envie d'ajouter que dans le cas de concours par exemple ou de forum, les responsables devraient d'une manière ou d'une autre jouer les modérateurs et "protéger" ceux qui se sont décarcasser pour pondre un truc. En clair, on ne devrait pas laisser passer certaines critiques en mode monoligne sniper. ça ne fait avancer personne.
Est-ce qu'il faut virer aussi les acclamations en une ligne ? Elles ne font pas avancer non plus.
Si on décide de publier et d'exposer son travail, on l'expose à la critique (positive ou négative). Si on estime qu'on a pas le cuir assez solide pour supporter les critiques, il faut peut-être renoncer ou passer outre ses craintes et s'exposer à la critique, même les remarques débiles. Une "protection" des auteurs telle que tu la demandes - c'est-à-dire une censure de toute critique insuffisamment argumentée - n'empêchera pas ces dernières de s'exprimer par d'autres canaux (surtout sur Internet), ça me semble donc juste être une déportation d'un problème à un autre.
Pour revenir sur le point précis exposé par Coraline, ou du moins ce que j'en ai compris (j'espère ne pas être totalement à côté de la plaque) :
Il existe des tas de personnes qui, bien qu'ils ne l'admettront jamais, considèrent que l'humiliation est fondamentalement formatrice (avis que je ne partage pas du tout). Cette opinion me semble d'autant plus courante que la personne se considère comme appartenant à une élite (morale ou intellectuelle, notamment).
Des tas de groupes religieux ou d'ordres monastiques obligent les novices à des séances d'humiliation censées lui apprendre l'humilité, casser sa personnalité d'avant et l'ouvrir à une profonde remise en cause de lui-même avant de disposer du droit d'entrer dans l'ordre, auto-défini comme une élite morale.
Beaucoup de mes amis qui ont passé des concours de l'Education nationale sont rentrés des oraux totalement dévastés parce qu'ils s'étaient fait traîner dans la boue pendant une demi-heure - sans possibilité de riposter vu le contexte - avant de découvrir que malgré l'humiliation subie, ils étaient quand même pris. Cela signifie que dans l'esprit des jurys, l'humiliation ne visait pas à signifier au candidat qu'il n'était pas à sa place mais était simplement perçu comme un passage obligé pour rentrer dans la "caste". Les notes, souvent grotesquement basses, données aux participants à ces concours, y compris à ceux qui l'ont à la fin ne reflètent finalement pas la valeur du candidat mais font passer un message : vous entrez dans la profession mais vous êtes au bas de l'échelle et ceux qui vous ont jugés vous sont supérieurs.
Je vois ce type de comportement et les grilles de notes à ces concours comme une perversion narcissique institutionnalisée par les "insiders". Une forme de bizutage qui ne dit pas son nom et s'enrobe, pour se donner bonne conscience, dans les draps de la méritocratie.
Pour un concours d'écriture, vu l'égo démesuré de certains écrivains et/ou critiques et l'esprit de corps parfois développé entre ceux qui ont publié, le fait de rencontrer ce genre de mécanismes ne m'étonne pas : pour entrer dans la caste des Ôooteurs, il faut d'abord passer par une humiliation qui montrera que tu es digne d'entrer dans la caste. Les candidats ne doivent pas croire que, parce qu'ils ont été reçus, ils n'en sont pas moins les inférieurs de ceux qui se sont mis en position de juger leur travail. Ils ne sont que des novices et doivent bien garder cela en tête. Ne parlons même pas des candidats malheureux, ces sous-êtres qui dans l'échelle de l'évolution sont à peine supérieurs aux cloportes. Si, par le choix des mots employés, il est évident que la critique a été construite pour être blessante, je pense que cela en dit plus long sur le juré que sur le texte proposé ou les qualités intrinsèques de son auteur.
Et pour ce type de personnage, le mépris me semble une réponse appropriée.
Et en plus, je n'ai strictement rien à vous vendre.